A quoi bon tirer sur la corde...
Les étirements, c’est sûrement un des sujets préférés des coureurs qui papotent durant le footing. Mais c’est aussi un thème accablé de dogmes, de fausses idées et où chacun y va de son avis d’expert. Quelques méthodes sont sûrement efficaces pour certains, mais pas généralisables à tous. C’est pourquoi on te propose de faire le tri dans tout ce que tu as évidemment déjà entendu sur le sujet, en t’éclairant à la lumière des preuves scientifiques et de notre expérience de terrain.
Tout d’abord, il faut savoir que ce sujet a fait et fera encore couler beaucoup d’encre. Même si de futures recherches sont nécessaires pour confirmer et affiner les savoirs actuels, de grandes lignes semblent se dégager pour nous permettre une prise de décision pertinente et efficace pour chaque cas rencontré.
Les différents types d'étirement
Il existe différents types d’étirement avec chacun ses modalités d’application, ses avantages et inconvénients, et surtout son public approprié. On te propose de détailler les plus fréquents et les plus étudiés pour leur efficacité.
– Les étirements statiques : ce sont les plus fréquents. Ils consistent à étirer un groupe musculaire en le plaçant au maximum de son allongement et de maintenir la position 30 secondes ou plus, et ce avec différentes intensités d’étirement possibles.
– Les étirements dynamiques (ou mobilité) : ils nécessitent l’utilisation de patterns de mouvements spécifiques au sport pratiqué, pour permettre un allongement dynamique des muscles à travers un mouvement fonctionnel réalisé avec facilité. On peut inclure ici les fameuses gammes athlétiques, comme les indémodables montées de genoux ou talons aux fesses.
– Les étirements balistiques : ici, on force le membre à aller rapidement dans une position extrême entraînant ainsi l’étirement automatique des muscles. Vitesse d’exécution et rebond sont les mots d’ordre au cours des mouvements.
Comment ça marche physiologiquement ?
On a longtemps cru que l’étirement musculaire allongeait le muscle lui-même. Alors oui, l’efficacité de certaines techniques est là, mais peut-être pas pour les raisons que l’on croit. Depuis quelques années, des recherches scientifiques avancent une hypothèse qui demande encore des précisions, mais qui paraît bien plus probable et cohérente.
Lorsque l’on étire un muscle, celui-ci ne s’allonge a priori pas au niveau histologique. Ce serait plutôt une amélioration de sa tolérance à l’étirement, rendue possible par un mécanisme nerveux. Le muscle ne gagne pas en longueur pure, mais c’est le système nerveux qui autorise une diminution de la douleur à sa mise en tension. C’est ce qui se passerait la plupart du temps et qui expliquerait le gain d’amplitude.
Car pour réellement allonger un muscle, les conditions suivantes seraient obligatoirement nécessaires : 20 minutes de maintien de l’étirement, douleur ressentie évaluée à 7 sur 10 durant ce dernier et 5 séances par semaine d’étire- ment pour ce même muscle. On est d’accord, très peu de personnes respectent ces modalités.
Bienfaits ou méfaits ?
On entend beaucoup de bienfaits relatifs à la pratique des étirements. Si bien que si tu n’en fais pas tu culpabiliserais presque. Un autre raisonnement courant est de se dire : « ah, c’est normal que je me sois blessé, je suis tellement raide ». Remettons de l’ordre et de la science dans tout ça !
1- Les étirements ne diminuent pas tes courbatures et n’améliorent pas ta récupération
Qu’ils soient réalisés avant ou après l’effort, les étirements n’ont aucun impact sur les courbatures (ou DOMS). Ces dernières sont le résultat de microtrauma- tismes musculaires provenant d’un travail musculaire excessif et inhabituel. C’est donc désagréable et douloureux, mais naturel !
2 – Les étirements n’améliorent pas ta performance
T’étirer avant l’effort de manière statique prolongée diminue les paramètres de performance suivants : la force, la vitesse, l’endurance et l’impulsion. Les étirements balistiques sont encore peu étudiés. Mais en pré-effort, ils paraissent plus adaptés pour des activités nécessitant une grande amplitude de mouve- ment (haute vitesse de course).
3 – Les étirements ne diminuent pas ton risque de blessure
Contrairement au renforcement musculaire, les étirements ne diminuent pas ton risque de blessure (va voir la partie « À part ça » sur le renforcement musculaire et la course à pied pour en savoir plus). Dans certaines conditions, les étirements augmenteraient même ce risque. La vraie question à se poser serait plutôt celle-ci : en ai-je besoin ? Lis la suite si tu veux tout savoir.
4 – Et le ressenti dans tout ça ?
On n’enlèvera jamais la part de ressenti, de bien-être dans nos conseils. Ce para- mètre, comparable aux attentes de la personne, est aussi à prendre en compte dans l’élaboration d’un traitement ou la dispensation de conseils. T’étirer te fait du bien ? Pas de soucis. Dans ce cas, étire-toi à distance (au moins 2 h après) de tes entraînements, ou dédie une séance complète à cette pratique. Maintiens un temps d’étirement de 30” par groupe musculaire et réalise 3 répétitions. L’intensité de l’étirement doit être assez faible.
En ai-je besoin ?
C’est LA vraie question qui compte et qui va dicter le choix ou non de s’étirer, et si oui, comment.
L’avis d’un professionnel qualifié et habitué à la prise en charge des personnes pratiquant la course est primordial pour cette étape. En effet, ce n’est qu’après un bilan individuel pour recueillir bon nombre de données (type de pratique, objectifs, habitudes, pathologie présente ou antécédents, mesures des ampli- tudes, etc.) que l’on pourra opter pour la meilleure prise en charge individualisée, en tenant compte de tous les paramètres. Quoi qu’il en soit, il semble plus pertinent d’étirer les muscles proximaux, à savoir les muscles autour de la hanche. Les mollets et les ischio-jambiers ne sont à étirer que sur recommandation d’un professionnel de santé. On te propose donc un organigramme, à la fin de ce chapitre, pour être plus parlant.
Etirements ou mobilité ?
La mobilité correspond aux étirements dynamiques (expliqué plus haut). Ces mouvements actifs permettent d’explorer les amplitudes complètes de manière répétée, consciente et contrôlée. Certains l’assimilent même à du renforcement musculaire sans charge. Les effets positifs sont là : amélioration de l’amplitude, de la conscience corporelle, du contrôle moteur, réduction des douleurs et j’en passe…
La différence avec l’étirement passif ? La mobilité est active, plus fonctionnelle, avec moins de risques de blessure ou d’erreurs d’exécution.
Nous vous aidons à chosir !
